Ramdane Abane's aura and charisma inspired the French writer Rene Victor Pilhes to write "The Night of Zelemta" (2016). A disappointing novel but an interesting angle... read a review in French here on TSA:
Une rencontre avec Ramdane Abane durant
son incarcération à Albi, et sur la route du Maroc après les exactions
du Général Massu, ce serait comment ?
C’est la question qui inspire toute
l’intrigue de « La nuit de Zelemta » (Albin Michel, 2016) de l’auteur
français René-Victor Pilhes et autour de laquelle le roman pivote.
Les premières pages s’ouvrent sur deux
hommes en conversation. Le curé Gabriel Antus écoute les dernières
confidences du sous-lieutenant Leutier, gravement blessé. Son corps ne
tiendra plus longtemps, Leutier le sait, alors il raconte.
Jean Michel Leutier est né à Aïn
Témouchent. Il a 18 ans en 1953, et ses prouesses scolaires lui
promettent un bel avenir en Droit. Ses parents décident de l’envoyer à
Toulouse pour poursuivre ses études, et c’est en philosophie que le
jeune homme va particulièrement se distinguer. Lorsque Leutier rencontre
Rolande Jouli, la sœur de Jacques son très bon copain de classe, il
décide d’essayer de la côtoyer. Jacques, amusé, accepte de l’inviter
chez lui à Albi régulièrement pour qu’il puisse voir la jeune fille et
se présenter à sa famille. Durant ces visites, Leutier accompagne
Rolande et sa mère, très portée sur les œuvres de charité aux hôpitaux
et prisons. C’est ainsi qu’il va se retrouver à les accompagner à la
prison d’Albi, et va rencontrer à sa stupeur Ramdane Abane.
Ramdane Abane fut incarcéré de 1953 à
1954 à Albi en tant que prisonnier politique. La plus grande souplesse
de cette administration carcérale et son statut permettront à ce détenu
extraordinaire d’échanger librement, et dans cette fiction, de discuter
seul avec le jeune Leutier.
Ces rencontres vont être une phénoménale
prise de conscience pour Leutier qui, jeune, naïf, et surtout aveugle,
n’a pas su voir l’injustice qui l’entoure en Algérie et que subissent
ses camarades depuis leur plus jeune âge. En très peu de temps, Abane va
lui ouvrir les yeux. Leutier ne va jamais oublier cet éveil.
Mourant, Leutier va confier au curé
Antus le souvenir de ses rencontres avec Abane à Albi, et surtout celui
de la nuit où il va le revoir, quatre ans plus tard en début mars 1957,
lorsque Abane va s’échapper vers le Maroc.
Soixante ans s’écoulent, et Antus décide
d’écrire les confidences de Leutier lorsqu’il apprend que quelqu’un
enquête sur la mystérieuse nuit de Zelemta.
Les conversations imaginaires entre
Abane et Leutier, dans une prose sculptée, constituent en fait une très
petite partie du roman. Ces conversations sont essentielles pour le
développement du personnage de Leutier, mais leur durée, quelques lignes
seulement, et leurs teneurs ne font entrevoir Abane que très
légèrement.
Ces brides de discussions très brèves
sont la source de la prise de conscience de Leutier et de sa graduelle
compréhension de la situation dans laquelle les Français d’Algérie se
sont engloutis. Mais la chair du roman, c’est Leutier et son éveil.
Toute la dynamique de l’histoire, elle, est fondée sur le mystère de la
nuit de Zelemta, une nuit durant laquelle Leutier patrouillait.
René-Victor Pilhes, né en 1934, a
lui-même été étudiant à Toulouse et a fait son service militaire en
Algérie dans l’Oranie qu’il décrit. Zelemta est d’ailleurs un lieu réel
qui se situe entre Mascara et Tiaret.
Dans une interview avec Benjamin Stora
dont il a beaucoup lu les écrits pour construire le personnage de Abane,
et pour insérer des épisodes historiques factuels dont parle Leutier,
Pilhes explique très clairement l’angle qu’il a voulu explorer dans ce
roman. Cette fiction est « une reflexion autour d’une histoire qui m’obsède depuis près de 60 ans »,
confie l’auteur. Il avait déjà envisagé de l’écrire après son service
militaire en Algérie, mais a préféré attendre. C’est quand sa
compréhension et sa compassion pour la douleur des Français d’Algérie
ont mûri qu’il a décidé d’écrire ce roman, construit autour de la rumeur
d’une rencontre fortuite entre un sous-officier français et Ramdane
Abane sur la route du Maroc. Une rumeur bien réelle selon l’auteur, qui a
circulé dans les cantines des soldats de cette période.
Ressusciter les grands noms de
l’histoire dans des œuvres de fiction et leur redonner un souffle de vie
permet d’explorer sous un nouvel angle la vie et le rôle des femmes et
des hommes qui ont participé à l’édification de l’Algérie d’aujourd’hui.
Ces fictions historiques sont une forme de transmission de mémoire,
elles permettent aussi de préserver un espace de recueillement pour les
grands « effacés » de l’histoire.
« La nuit de Zelemta » de René-Victor Pilhes, éditions Albin Michel (Janvier 2016), pp. 192
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