Hmida Ayachi is a well-established Algerian novelist and playright who writes in Arabic. One of his masterpieces "متاهات، ليل الفتنة" was translated into French by Lotfi Nia and published by Barzakh in October 2016.
I have not yet read him in Arabic but the translation was astounding. Translator Lotfi Nia has made me discover an author who will remain one of my favourite Algerian novelist.
My review The Maze on TSA in French below and here: Dédales, la nuit de la grande discorde de Hmida Ayachi
Dédales, la nuit de la grande discorde de Hmida Ayachi
Au mois d’octobre, le deuxième roman de Hmida Ayachi متاهات، ليل الفتنة a resurgi sur la scène littéraire grâce au traducteur Lotfi Nia. Matahat est maintenant publié en traduction sous le titre « Dédales – la nuit de la grande discorde » (Barzakh 2016).
Cette traduction permet de redécouvrir l’une des œuvres majeures de Hmida Ayachi, dont l’original était publié en 2000, et de renouer avec la théâtralité des textes de cet auteur.
Hmida Ayachi est romancier, essayiste et dramaturge et « Dédales » est un très bel exemple de l’agilité et de la créativité de Ayachi, un roman dans lequel l’auteur a allié écriture narrative et dramatique.
Le terme ‘personnage’ désignait le masque de l’acteur dans l’antiquité, ce glissement de sens sied tout particulièrement à « Dédales » dans lequel théâtre et roman en tant que genres sont étroitement liés, chacun empruntant à l’autre. Et ce sont plusieurs masques que Ayachi va façonner autour de Hmidou, le personnage qui va rentrer le premier dans cette « nuit de la grande discorde ».
C’est en allant visiter une parente que le père de Hmidou se retrouve témoin de la fureur qu’Abou Yazid et ses hommes vont déchaîner sur les habitants de Makedra, un petit village près de Sidi Bel Abbes, et du massacre qu’ils vont y perpétrer. Alors que le groupe s’approche, tous reconnaissent Abou Yazid à sa tête, l’un des leurs qu’ils ont meurtrit et maudit lorsqu’il était enfant. Aujourd’hui, il est à la tête de « deux cents éléments armés de la phalange d’El-Khadra », et il est revenu pour abreuver sa vengeance.
Hmidou décide de partir pour Makedra pour voir son père. Les horreurs et le sang versé lui remémorent l’histoire de sa famille et celle des membres de ce village, avant et après l’arrivée du nouvel imam et des hommes comme Mohamed Haroun lorsque « Sidi Bel Abbes et d’autres régions d’Algérie furent secouées par un grondement jusqu’alors inconnu ».
Après avoir revu sa famille et les fantômes de son passé, Hmidou revient à Alger pour continuer à travailler sur ses reportages avec Omar, Ali Khodja et Hmida, l’alter ego de l’auteur. Suite à leur rencontre avec le ‘Général à la retraite’, les événements se précipitent. Le dédale va se refermer pendant la visite d’Alexandra qui s’apprête à revenir à Alger pour un reportage. H’mida a un pressentiment, s’il sait interpréter son cauchemar, il sauvera sa vie.
La violence et tous les fléaux qu’elle va engendrer vont peu à peu détruire les frontières qui séparent cauchemars, illusions et quotidien. L’Histoire devient l’histoire pour Hmidou lorsqu’il découvre un personnage historique, un autre Abou Yazid, Abou Yazid al-Nikari lui aussi renégat et assoiffé de sang. Ses premières rencontres, jeune, avec Warda maintenant son épouse, se transforment en poème, et la vie qu’il partage avec elle, en prophétie.
Cette réalité brouillée, ce tiraillement permanent entre hantise et a-normalité, va engloutir tous ceux pour qui le temps va se figer pendant une décade. Omar, photographe, se revoit enfant avec son frère Rachid, parti en Afghanistan et passé pour mort jusqu’à son court retour. Ali Khodja, de mère égyptienne, contemple comment après avoir traversé les géographies, de l’Égypte à l’Algérie, il est arrivé au même point de violence. H’mida qui a « l’impression d’ouvrir les yeux dans le noir le plus complet » lui s’accroche à ses souvenirs de Aïcha pour ne pas sombrer. Kamel Mansour, qui s’est échappé de la prison de Lambèse avec une centaine d’autres, essaie de se remémorer qui il était avant la prison car son « cœur a cessé de battre, mon cœur ne bat plus ».
Ayachi construit cinq architectures et cheminements dans « Dédales », cinq scènes, nocturnes, dans le labyrinthe que ces années vont ciselées : le dédale du malheur, de la blessure, de la poussière, le dédale du dédale et celui des cauchemars.
C’est en jouant avec les modes d’énonciations et les effets visuels portés par la typographie du texte que Ayachi fait entrer le théâtre dans son roman, entre récits et dialogues, cauchemars et observations, narrations et déclarations.
Les effets de typographie comme les juxtapositions de langue arabe et langue française, créent une narration dynamique, émouvante, et un effet de lumière sur et dans le texte. Les calligrammes qui s’entre-lient comme les tatouages des femmes de Makedra, transmettent aussi le rythme des fqirat et autres chants mystiques des habitants de ce roman. Ces effets visuels, présents dans l’original, ont été respectés et soignés dans le texte traduit et son édition.
Peu sont les romans sur les années 90s qui ont su se réapproprier une identité littéraire au-delà du traumatisme. « Dédales » est l’un d’eux. Ayachi a non seulement créé à partir d’une destruction, il a renouvelé son art pour le et se redéfinir.
En dépassant les frontières du roman et de la représentation théâtrale dans « Dédales », Ayachi a construit une œuvre nouvelle, hybride, mouvante, et a introduit le « théâtre de la cruauté » dans le corpus littéraire algérien.
« Dédales, la nuit de la grande discorde » de Hmida Ayachi traduit de l’arabe vers le français par Lotfi Nia, Barzakh, octobre 2016, pp. 266.
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